Ducati vit un week-end chaotique en Indonésie alors que Márquez se blesse et que Bagnaia peine à retrouver la forme
Le week-end du Grand Prix d’Indonésie sur le circuit de Mandalika s’est révélé être l’un des plus difficiles et des plus mouvementés de la saison MotoGP 2025 pour Ducati. Marc Márquez et Francesco Bagnaia ont connu des fortunes diverses, secouant la dynamique d’une campagne jusque-là largement dominée par la marque italienne. Alors que Márquez a vu son week-end s’achever prématurément après une violente chute et une blessure, Bagnaia a continué à lutter avec les caractéristiques de maniabilité de sa GP25, laissant Ducati avec plus de questions que de réponses à l’approche du dernier tronçon du championnat.
Le week-end de Márquez se termine dans la douleur
Marc Márquez est arrivé en Indonésie en pleine confiance, fort d’une saison largement dominée et déjà sacré champion du monde MotoGP 2025. Pourtant, le huituple champion du monde a vécu l’un de ses week-ends les plus compliqués de l’année, bien loin de la précision et de la sérénité qui avaient marqué son parcours jusqu’ici.
Dès les qualifications, Márquez ne parvient pas à retrouver le rythme habituel qui l’avait porté sur les podiums précédents et doit se contenter de la neuvième position sur la grille. Lors de la course Sprint du samedi, il sauve une sixième place malgré une pénalité de long-lap infligée pour un incident antérieur avec Álex Rins. Cette sanction lui coûte un temps précieux en début de course, et bien qu’il parvienne à remonter dans le top 6, il est clair qu’il ne se sent pas totalement à l’aise avec le réglage de sa Ducati.
Mais la course principale du dimanche tourne au cauchemar. Dès les premiers tours, Márquez est percuté à haute vitesse dans le virage 7 par Marco Bezzecchi, qui a perdu le contrôle de sa machine. Les deux pilotes s’envolent dans le bac à gravier, et Márquez retombe lourdement sur son épaule droite. Les examens médicaux révèlent alors une lésion ligamentaire et une petite fracture de la clavicule, l’écartant des deux prochaines manches à Phillip Island et Sepang.
Heureusement, la blessure ne nécessite pas d’intervention chirurgicale, permettant à l’Espagnol de se rétablir naturellement. Déjà titré, Márquez n’a aucun besoin de précipiter son retour et pourra se concentrer sur sa récupération complète avant la saison 2026, où il visera un dixième titre mondial et un huitième sacre dans la catégorie reine.
Les difficultés de Bagnaia persistent sur fond de spéculations chez Ducati
Pour Francesco Bagnaia, le rendez-vous indonésien a été une nouvelle source de frustration dans une saison marquée par l’irrégularité. Après un doublé spectaculaire depuis la pole position à Motegi, le champion du monde en titre semblait avoir retrouvé sa fluidité au guidon de la GP25, notamment après un test prometteur à Misano, où il avait essayé certains éléments de la GP24. Ces évolutions, intégrées dans son réglage pour le Japon et l’Indonésie, semblaient initialement porter leurs fruits.
Mais à Mandalika, le scénario s’est inversé. Bagnaia a connu un week-end cauchemardesque, ne signant que le seizième temps des qualifications — son pire résultat de l’année — avant de terminer dernier lors de la course Sprint. Le dimanche, il peine à trouver le rythme et finit par chuter en milieu de course après avoir évolué en fond de peloton.
Ce nouvel échec relance les interrogations autour de la stratégie de développement de Ducati et de la direction prise avec la GP25, certains observateurs estimant que la machine s’est trop éloignée de l’équilibre et de la stabilité de sa prédécesseure, la GP24.
Des rumeurs ont même circulé dans le paddock selon lesquelles Bagnaia aurait expérimenté une machine dotée d’un châssis ou d’un moteur inspiré de la GP24, similaire à celui de Franco Morbidelli, lors des tests post-Misano. Ducati a toutefois fermement démenti ces allégations, maintenant un silence absolu sur les spécifications techniques de sa moto actuelle.
Dall’Igna intervient pour faire taire les “rumeurs stupides” sur la moto de Márquez
Face à l’escalade des spéculations, le directeur général de Ducati Corse, Luigi Dall’Igna, a décidé de réagir personnellement pour mettre un terme aux “rumeurs stupides” circulant sur la moto de Márquez.
Selon le journaliste chevronné Julian Ryder, qui s’est exprimé sur Racing Back, Dall’Igna aurait contacté plusieurs journalistes expérimentés juste avant le Grand Prix d’Indonésie afin de clarifier les fausses informations prétendant que Márquez roulait sur une GP24 au lieu de la GP25 officielle.
La confusion serait née du fait que Márquez obtenait de bien meilleurs résultats que Bagnaia et Fabio Di Giannantonio — deux pilotes qui, eux, semblaient parfois en difficulté avec le modèle 2025 —, alimentant les soupçons selon lesquels l’Espagnol bénéficiait d’une version antérieure plus stable.
Ryder raconte :
“Il y a eu un coup de téléphone intéressant juste avant la course en Indonésie. Trois ou quatre journalistes vétérans ont été appelés par Gigi. Il voulait stopper les rumeurs absurdes selon lesquelles Ducati aurait donné une GP24 à Márquez. Il n’a d’ailleurs aucun moteur de 2024 dans son allocation, mais certains préfèrent ignorer ce genre de faits, n’est-ce pas ?”
Le patron de Ducati a également abordé la question des composés de pneus utilisés à Mandalika, laissant entendre que l’inconfort de Bagnaia pouvait avoir été accentué par les gommes spécialement traitées pour la chaleur, déjà utilisées sur certains circuits comme la Thaïlande.
Ryder conclut avec une remarque révélatrice sur la personnalité de Dall’Igna :
“Gigi est aussi un homme dont j’ai déjà entendu dire avec un fin sourire : ‘Mais nous aussi, nous mentons parfois.’”
Une phrase qui résume parfaitement la relation complexe entre Ducati et les médias, faite de secret, de stratégie et d’un certain goût pour le mystère technologique.
Pirro remplace Márquez à Phillip Island
Avec Márquez contraint au repos, Ducati a décidé de faire appel à son pilote d’essais de longue date, Michele Pirro, pour le remplacer à Phillip Island. Le vétéran italien, pilier du développement technique de la marque depuis plus d’une décennie, disputera ainsi son 70e départ en MotoGP en Australie.
Grâce à sa connaissance approfondie des caractéristiques de la GP25, Pirro apparaît comme le choix logique pour assurer la transition. Sa participation à la manche suivante en Malaisie n’a toutefois pas encore été confirmée.
Sa présence offrira à Ducati un pilote expérimenté capable de fournir des retours techniques précis, même si l’objectif sera davantage d’accumuler des données que de viser un podium en l’absence de Márquez.
Bulega décline le rôle de remplaçant en MotoGP
Un autre nom circulait pour remplacer Márquez : celui de Nicolo Bulega, actuel pilote Ducati en Championnat du Monde Superbike (WSBK). L’Italien, l’un des grands espoirs de la marque en production-based racing, a été approché mais a finalement décliné l’offre, estimant qu’une apparition ponctuelle en MotoGP n’apporterait rien de significatif à sa carrière à long terme.
Déjà confirmé comme futur pilote d’essai Ducati en MotoGP pour 2026, Bulega ambitionne d’obtenir un guidon à plein temps d’ici 2027. Son choix de se concentrer sur ses engagements actuels en Superbike illustre une approche réfléchie et stratégique, saluée en interne par Ducati.
Et maintenant ?
Le week-end mouvementé de Mandalika a rappelé toute l’imprévisibilité du MotoGP, même pour un constructeur aussi dominateur que Ducati. Entre la blessure de Márquez et les difficultés persistantes de Bagnaia, la marque de Borgo Panigale voit sa dynamique momentanément freinée, soulevant de nouvelles questions sur l’évolution de la GP25 et l’équilibre entre innovation et pilotabilité.
À l’approche des épreuves de Phillip Island et Sepang, Ducati concentre désormais ses efforts sur la stabilité et la récupération. La santé de Márquez reste la priorité absolue, tandis que Bagnaia et les ingénieurs cherchent à retrouver des réglages plus confortables et constants.
Même si le titre mondial 2025 est déjà acquis, les dernières manches demeurent cruciales pour Ducati, qui y voit une occasion d’affiner les futures évolutions de ses prototypes et de réaffirmer son statut de référence dans la catégorie reine.
Le Grand Prix d’Indonésie aura été agité, certes, mais il rappelle surtout que, même au sommet de la hiérarchie, la quête de la perfection reste un défi permanent pour Ducati.