Fabio Quartararo exprime sa frustration croissante face aux difficultés persistantes de Yamaha malgré une belle performance en course
Fabio Quartararo a peut-être terminé à une solide quatrième place lors du dernier Grand Prix MotoGP et célébré un podium surprise lors de la course sprint la veille, mais le pilote français a rapidement mis fin à toute satisfaction dès qu’il a quitté sa moto. Si les résultats sur le papier laissent penser à un week-end plutôt réussi, le ton et l’attitude de Quartararo après la course racontaient une toute autre histoire — celle d’une frustration grandissante face à l’incapacité persistante de Yamaha à résoudre les problèmes fondamentaux de performance qui affligent la M1.
Un bon résultat qui ne reflète pas la réalité
Lors de la course principale du dimanche, Quartararo n’a pas connu le meilleur des départs. Malgré une bonne qualification, il a perdu plusieurs positions dans les premiers tours et s’est retrouvé relégué à la neuvième place. Mais au fil de la course, il a réussi à remonter progressivement. Grâce à une conduite régulière et aux chutes de certains pilotes de tête, il a pu se hisser jusqu’à la quatrième place à l’arrivée.
Si une place dans le top 5 aurait normalement de quoi satisfaire, Quartararo s’est montré loin d’être enthousiaste après l’arrivée. Visiblement agacé en regagnant son box, il s’est exprimé sans détour au micro de Canal+, expliquant que ce résultat ne faisait rien pour atténuer ses inquiétudes croissantes concernant la compétitivité de sa machine.
« Je n’ai eu aucune sensation sur la moto du début à la fin », a-t-il déclaré. « C’est incroyablement frustrant. Je ne peux pas prendre de plaisir à rouler comme ça. On fait des efforts, on travaille dur, mais il n’y a aucune réelle amélioration. C’est ça le plus dur. »
Un manque d’adhérence inexplicable
Parmi les problèmes les plus persistants selon Quartararo figure le manque chronique d’adhérence — un élément clé en MotoGP moderne. Le pilote de 25 ans a souligné que ce problème ne concerne pas uniquement certains circuits ou certaines conditions, mais qu’il les suit tout au long de la saison. Malgré divers réglages et approches de pilotage testés, l’équipe reste incapable de comprendre ou de résoudre ce déficit, ce qui le rend vulnérable face à ses rivaux pendant les courses.
« Personne ne comprend ce qui ne va pas », a-t-il déclaré. « On n’a pratiquement aucune adhérence. On voit les autres s’échapper, on essaye de pousser plus fort, mais on rencontre un autre problème : l’usure des pneus. Si on attaque pour suivre, on détruit les pneus. Si on les économise, on perd encore plus de temps — plus d’une demi-seconde au tour. C’est incompréhensible. »
Ces propos mettent en lumière l’équilibre précaire auquel les pilotes doivent faire face, surtout lorsque leur moto n’est pas au niveau de la concurrence. L’impossibilité de conjuguer rythme de course et gestion des pneus laisse Quartararo dans une impasse, incapable d’exploiter pleinement son potentiel sur la durée d’une course.
Une accumulation de défauts techniques
Mais Quartararo ne s’est pas arrêté là. Il a énuméré une série de problèmes techniques qui, selon lui, empêchent collectivement Yamaha d’être compétitive. Il a notamment pointé du doigt un manque de puissance, des lacunes en aérodynamique, et des systèmes électroniques dépassés — des domaines dans lesquels les autres constructeurs ont progressé de manière significative ces dernières années.
Il a précisé que Yamaha est parfois capable de se montrer compétitive sur un tour rapide en qualifications ou pendant les essais. Mais dès qu’il s’agit de maintenir un bon rythme en course, la M1 ne suit plus. Cette irrégularité, selon Quartararo, est l’un des symptômes les plus flagrants d’une moto fondamentalement inadaptée aux exigences des courses longues.
« C’est un ensemble de petits détails qui, mis bout à bout, font une grande différence », a-t-il expliqué. « On manque de puissance, on a des problèmes d’aéro, et nos électroniques ne s’adaptent pas bien — surtout quand les conditions de piste évoluent. Sur un seul tour, on peut encore être compétitifs. Mais dès que la course commence, nos performances chutent. Il n’y a tout simplement pas de constance. »
Une spirale frustrante qui se répète
Ce qui semble frustrer Quartararo davantage encore, c’est le caractère répétitif des problèmes et l’absence apparente de progrès d’un week-end à l’autre. Il a confié que Yamaha organise de longues séances de débriefing après chaque session et chaque course, où les mêmes problèmes sont abordés encore et encore. Pourtant, malgré cette analyse constante, rien ne change vraiment en piste.
« Franchement, c’est épuisant », a-t-il dit avec une voix teintée de résignation. « On parle tous les samedis et dimanches. On fait des réunions, on analyse tout, mais ce sont toujours les mêmes problèmes. Rien ne change. On ne trouve pas ce petit plus qu’il nous manque pour avancer. »
Malgré sa déception, Quartararo a réaffirmé son engagement à continuer de se battre. Il a déclaré qu’il restait concentré sur le fait de tirer le maximum de la machine qu’il a entre les mains et de viser les meilleurs résultats possibles. Toutefois, il a aussi clairement indiqué qu’il ne peut pas porter seul toute la responsabilité, et qu’il attend davantage de la part de Yamaha.
« Je fais ma part, je donne tout ce que j’ai pour me battre à l’avant », a-t-il dit. « Mais l’équipe doit aussi faire son travail. Ils ont un rôle à jouer, tout comme moi. »
Une crise plus large chez Yamaha
Les déclarations franches de Quartararo traduisent plus qu’un simple agacement individuel — elles mettent en lumière une crise plus large au sein du programme MotoGP de Yamaha. Jadis l’un des constructeurs de référence du championnat, la marque japonaise peine depuis plusieurs saisons à suivre le rythme de ses concurrents, notamment les usines européennes comme Ducati, Aprilia ou KTM. Alors que ces dernières ont adopté des approches innovantes, misant sur l’aérodynamique, les dispositifs de réglage de hauteur et les avancées électroniques, Yamaha est perçue comme plus conservatrice — et les résultats en pâtissent.
La M1, autrefois célèbre pour son agilité et sa vitesse en courbe, semble désormais dépassée. Les critiques de Quartararo — manque d’adhérence, accélération insuffisante, électronique inconstante — font écho aux observations de nombreux experts et anciens pilotes sur la philosophie actuelle de Yamaha en MotoGP.
Le manque de progrès tangible est d’autant plus inquiétant pour une équipe qui aligne un ancien champion du monde et l’un des pilotes les plus talentueux de la grille. Quartararo, sacré en 2021 avec Yamaha, a prouvé à maintes reprises qu’il pouvait gagner avec une moto compétitive. Mais tant que le constructeur japonais ne lui fournira pas une machine à la hauteur, son talent restera sous-exploité à se battre pour les miettes plutôt que pour des podiums.
Et maintenant ? Yamaha sous pression
À mesure que la saison MotoGP avance, la pression sur Yamaha pour fournir des améliorations concrètes devient de plus en plus forte. La frustration désormais publique de Quartararo pourrait indiquer des tensions plus profondes au sein de l’équipe, et sans progrès visibles dans les prochaines courses, la relation pourrait se détériorer davantage.
Dans un contexte où les contrats et les projets futurs sont toujours en toile de fond, les difficultés actuelles pourraient avoir des conséquences à long terme. Quartararo, bien qu’extrêmement loyal, ne tolérera probablement pas une nouvelle saison entière de stagnation sans réévaluer ses options.
Pour l’instant, le Français reste concentré sur son travail, tirant le maximum d’une machine en difficulté et menant les efforts de Yamaha avec professionnalisme. Mais comme il l’a clairement exprimé, le temps presse — et sa patience aussi.
Yamaha doit réagir de manière décisive pour soutenir son pilote vedette et retrouver sa place parmi l’élite du MotoGP, sous peine de perdre non seulement son avance technologique, mais aussi un talent capable de jouer le titre mondial.
