Marc Márquez en route vers la gloire du titre MotoGP 2025 au milieu d’un débat sur le comptage des championnats
La marche implacable de Marc Márquez vers le titre mondial MotoGP 2025 a longtemps semblé inévitable. Dès le moment où il a remporté trois des quatre premières courses de la saison, l’Espagnol s’est placé fermement sur la voie de ce que beaucoup dans le sport considèrent comme l’histoire de retour ultime. Désormais, avec le Grand Prix du Japon à Motegi à l’horizon, Márquez n’est plus qu’à un pas de sceller mathématiquement la couronne.
S’il devance son frère cadet Álex Márquez d’au moins trois points ce week-end, la lutte pour le titre sera officiellement terminée, confirmant son sacre avec plusieurs manches d’avance. Ce scénario marquerait l’aboutissement d’une saison où Marc a dominé le classement depuis les premières manches outre-mer en avril. Sa suprématie a été telle qu’il a, en moyenne, accru son avance de près de 14 points par Grand Prix, creusant un fossé colossal de 182 points à l’approche du Japon.
Les canaux officiels de MotoGP sur les réseaux sociaux se sont déjà emparés de la narration du « retour », mobilisant les fans autour du slogan #ComebackLoading — une référence directe au long et douloureux combat de Márquez contre les blessures lors de ses dernières années chez Honda. Ce qui était autrefois une histoire de doutes, d’opérations et de rééducation sans fin s’est transformé en une saga de résilience et de triomphe en rouge Ducati. Si le championnat est scellé à Motegi, le pilote de 31 ans sera officiellement honoré lors de la cérémonie de remise des prix de fin de saison, où il recevra le trophée emblématique « Tower of Champions », une reconnaissance de son exploit extraordinaire.
La position de Dorna : six fois champion ou neuvième titre global ?
Pourtant, alors même que Márquez se rapproche d’une nouvelle page dans l’histoire, une tempête de débats entoure la manière dont ses exploits doivent être présentés. L’un des principaux sujets de discussion à l’approche du GP du Japon concerne le langage employé par Dorna Sports, détenteur des droits commerciaux du MotoGP, pour décrire son sacre imminent.
Au début du mois, les canaux officiels de Dorna ont évoqué un Márquez sur le point de remporter son septième championnat du monde, une déclaration qui a immédiatement suscité une vive réaction des fans à travers le globe. Pour de nombreux supporters, cette formulation minimise son héritage. Márquez a déjà été champion en 125cc (2010) et en Moto2 (2012), avant de monter en catégorie reine où il a conquis six couronnes MotoGP. Selon la méthode traditionnelle qui additionne tous les titres — comme l’indiquent les statistiques officielles — cette année devrait donc être considérée comme son neuvième titre mondial.
La controverse s’est amplifiée avec l’évolution de la stratégie marketing du MotoGP depuis l’arrivée de Liberty Media, nouveau propriétaire également détenteur de la Formule 1. Sous l’impulsion de Liberty, Dorna cherche à simplifier la présentation du MotoGP en mettant exclusivement en avant la catégorie reine comme sommet incontesté de la course moto. D’après The Race, cette orientation correspond à une « érosion progressive » des titres en catégories inférieures dans les communications officielles. En Formule 1, les titres en formules juniors sont rarement mis en avant par rapport aux championnats F1. En adoptant une approche similaire, Liberty et Dorna semblent vouloir élever la couronne MotoGP comme unique référence de grandeur, une narration plus facile à saisir pour le grand public.
Dans le cadre de ce virage, les diffuseurs MotoGP auraient reçu la consigne de présenter Márquez comme un six fois champion — ou sept fois s’il décroche le titre 2025 — en laissant volontairement de côté ses titres en 125cc et Moto2. Pour un pilote dont l’image de marque et l’identité sont intimement liées à ses jalons historiques, l’impact est significatif. En 2019, après son huitième sacre, Márquez avait célébré en posant avec une immense boule de billard numéro huit, un geste symbolique qui soulignait à quel point il adhérait au comptage traditionnel.
La question est désormais de savoir comment Márquez choisira de célébrer à Motegi, ou plus tard lorsque le titre sera officialisé. Suivra-t-il la nouvelle narration de Dorna ou s’appuiera-t-il une fois de plus sur la réalité statistique plus large qui le place comme neuf fois champion du monde ?
La perspective de Márquez sur la controverse
Interrogé à ce sujet lors de la conférence de presse d’avant-course jeudi, Márquez a adopté un ton diplomatique :
« Ce n’est pas entre mes mains », a-t-il déclaré, soulignant que le débat sur la façon de présenter sa carrière ne dépend pas de lui. Sa réponse mesurée reflétait un désir clair de rester concentré sur l’essentiel — gagner des courses et achever le travail en piste.
En coulisses toutefois, on comprend que Márquez a eu des échanges avec la direction de Dorna au sujet de cette terminologie. Selon des sources internes, l’instance souhaitait préciser qu’elle ne cherche pas à minimiser ses accomplissements ni à effacer deux de ses titres. Le changement s’inscrit plutôt dans une stratégie globale visant à aligner la communication du MotoGP avec la vision de Liberty Media en matière de divertissement sportif mondial.
Márquez, sans être totalement convaincu, aurait accepté cette position avec pragmatisme. Il perçoit les implications plus larges pour l’histoire du MotoGP, notamment dans la comparaison entre pilotes de différentes époques. Giacomo Agostini, par exemple, a remporté 15 titres mondiaux toutes catégories confondues, mais « seulement » huit en catégorie reine. Si le MotoGP bascule définitivement vers un comptage limité à la catégorie reine, le record d’Agostini serait requalifié, modifiant des décennies de perspective historique.
Quoi qu’il en soit, Márquez semble déterminé à ne pas laisser les débats sémantiques occulter son succès en piste. Qu’il soit présenté comme six, sept ou neuf fois champion, un fait demeure : son titre 2025 le placera à égalité avec les sept couronnes en catégorie reine de Valentino Rossi — un cap symbolique au vu de leur rivalité légendaire et de l’admiration que Márquez a toujours portée à Rossi dans sa jeunesse.
Une saison de domination et de rédemption
Le débat sur le comptage accapare les gros titres, mais les performances en piste de Márquez en 2025 méritent tout autant d’attention. Après avoir quitté Honda à l’issue d’une période douloureuse, marquée par les blessures et une machine peu compétitive, beaucoup doutaient de sa capacité à retrouver son niveau de domination. Entre 2020 et 2023, ses multiples opérations au bras et ses résultats en dents de scie avaient fait craindre que son règne soit terminé.
Pourtant, sous les couleurs Ducati, Márquez a rappelé au monde toute l’étendue de son talent. Son style agressif, sa maîtrise du freinage tardif et sa capacité à livrer dans les moments de pression sont revenus au premier plan. En remportant trois des quatre premières courses de l’année, il a immédiatement affiché ses intentions, construisant un élan qu’aucun rival n’a pu enrayer. Sa régularité a été tout aussi impressionnante : même lors des week-ends sans victoire, il est rarement sorti du podium, consolidant progressivement une avance insurmontable.
Le contraste entre la renaissance de Márquez et la domination continue de Ducati en tant que constructeur est devenu l’histoire clé de la saison. Avec une machine supérieure et un package technique redoutable, l’association du pilote et de la moto a constitué une force irrésistible, laissant les concurrents loin derrière.
Pour Márquez, la portée symbolique de ce titre est immense. Il ne marque pas seulement son retour au sommet du MotoGP, mais illustre aussi sa capacité à surmonter l’adversité face à des blessures menaçant sa carrière. Rares sont les athlètes de l’histoire du sport automobile à avoir connu un tel parcours en montagnes russes : d’une domination intouchable à ses débuts, à une chute quasi fatale, puis à une résurrection spectaculaire pour reconquérir le plus grand prix du sport.
Perspectives : héritage, rivalités et célébration
À l’approche du GP du Japon, l’attention se porte non seulement sur la confirmation du titre, mais aussi sur la manière dont l’instant sera gravé dans les mémoires. Si Márquez est sacré, cela représentera l’un des retours les plus saisissants de l’histoire moderne du MotoGP — un pilote que beaucoup croyaient fini, redevenu maître du sommet.
Tout aussi intrigante est la façon dont ce jalon sera présenté par la communication officielle du MotoGP et par Márquez lui-même. Adoptera-t-il le nouveau système de comptage de Dorna ou insistera-t-il pour reconnaître l’ensemble de ses succès ? Son choix pourrait créer un précédent sur la manière dont les générations futures de pilotes seront célébrées.
De plus, ce résultat place Márquez à égalité avec Valentino Rossi en nombre de titres en catégorie reine. Si Rossi reste l’icône la plus populaire et la plus influente du sport, le nouveau triomphe de Márquez renforce encore son statut parmi les plus grands de l’histoire. Le débat sur le « GOAT » — Rossi, Márquez ou Agostini — ne fera que s’intensifier.
Quelles que soient les sémantiques, une vérité demeure incontestable : le titre MotoGP 2025 de Marc Márquez représente l’aboutissement de l’une des carrières les plus déterminées et résilientes du sport automobile. De ses débuts prodigieux en 125cc, à sa domination en Moto2, puis à ses multiples sacres en MotoGP, son héritage est déjà gravé dans l’histoire. La seule question qui subsiste est : comment le récit officiel choisira-t-il de raconter cette histoire ?